Loup-Garou partie 38: RP (Réservé au MJ)

- Avancez s’il vous plait !

La salle du conseil était pleine à craquer. Elle raisonnait du brouhaha du va-et-vient incessant des assesseurs du bureau. Tout le monde était surexcité! C’est qu’on n’organisait pas tous les jours une élection présidentielle. Les équipes avaient été mobilisées dès l’aurore pour assurer toute la logistique de préparation du dépouillement.

- « A voté ! »

Des litres de café avaient été préparés par Jacque VaBreiht, le barman du coin. Il fallait que les assesseurs restent éveillés jusqu’au bout de la nuit, si besoin!

- « A voté ! »

Au bout de la salle, une table se dressait derrière laquelle avait pris place l’équipe chargée du dépouillement. On avait là Monaciellauto, moniteur d’auto-école, vieux garçon de quarante ans qui se donnait un air important. C’était lui le plus expérimenté ici, il avait déjà participé à cinq élections comme secrétaire, oui madame, puis comme second assesseur, puis comme assesseur, et il briguait maintenant en toute légitimité la Présidence du Bureau de Dépouillement.

- « A voté ! »

A côté de lui se trouvait Guerlintelline l’esthéticienne, maquillée du front au menton, de l’oreille au sourcil, on était jamais assez bien pour les Grrandes Occasions. Elle regardait Monaciellauto avec pamoison, on sentait qu’il avait l’Expérrience des Grrandes Elections. Pour elle, c’était la première fois, et elle était un peu émue.

- « A voté ! »

Au milieu de la table, Zarackaïkaïkaï s’était endormi. C’est qu’il avait passé une nuit difficile à frayer un couple de dogues allemands encore plus frigides qu’Angela. Si bien qu’aucun des

- « A voté ! »

Criés par le petit excité à côté de lui n’était de nature à le réveiller. Ce champion de courses de drones, c’était Perfect Crime. Enfin pas tout-à-fait parfait, il était quand même obligé de se taper 200h de travaux d’intérêt général depuis qu’un de ses engins avait défoncé les vitres du Conseil Municipal. Il comptait sur ces élections pour se débarrasser d’une bonne partie de ces heures.

- « A voté ! »

Tout au bout de la table, TheHope le prof de philo n’en avait plus vraiment. Il pensait que cette année il serait enfin dispensé, que ça serait au tour de Mme Jeannine la prof de français de venir perdre son temps un dimanche après-midi. Mais NON !! C’était Encore à lui de se taper ces s********* de t**********t de m*********** d’ùà&éeé&àeà)&éeç& .

- « A voté ! »

Equipé de son haut-parleur dans lequel il hurlait des ordres incohérents, suivit de contrordres cohérents, Xarfracoustix l’animateur de centre aéré tentait d’aiguiller les files d’électeurs qui avançaient, chargés de leur précieux bulletin. Ils déversaient dans les urnes prévues tous leurs votes, destinés à être triés, comptés, re-triés, re-comptés, re-re-triés, re-re-recomptés, re-re-re-retriés, re-re-re-recomptés, re-re-re-re-retriés, re-re-re-re-recomptés,… deux précautions valent toujours mieux qu’une. Et trois que deux d’ailleurs. Et quatre que trois. Et ….

- « A voté ! »

Dans la pièce du fond, Petit RuissEau de Javel était en train de nettoyer les carreaux du carrelage de la salle de comptage, pour que tout soit bien prop’. Surtout les joints du troisième carreau du carrelage en partant du fond à gauche. Elle n’arrivait jamais à nettoyer parfaitement les joints du troisième carreau du carrelage en partant du fond à gauche. C’était extrêmement frustrant ! Elle avait pourtant essayé de nettoyer parfaitement depuis des mois, essayant un nouveau produit chaque semaine. Mais les joints du troisième carreau du carrelage en partant du fond à gauche lui résistaient toujours. Ils étaient gris souris. Alors qu’ils devraient être gris anthracite COMME LES AUTRES !

- « A voté ! »

A l’entrée, MaxiMuR le vigile faisait les cent pas. Il vérifiait que tout était sous contrôle. Tout devait être terminé avant 17h30, parce qu’il fallait démarrer le dépouillement à 18h.

- « A voté ! »

Des cuisines de la cantine se dégageait une bonne odeur de pizza froide. MozarellAgielus n’avait pas fait les choses à moitié : 10 kg de pate, 5 kg de sauce tomate, 4 kg d’emmental, 10 bocaux d’olive, 15 boîtes d’anchois, 10 boîtes de coeur d’artichaut, 1 jambon à l’os, mmh ça serait bon ! Réchauffées au micro-onde pendant la nuit, ça permettrait de se caler l’estomac.

A 18h, une fois que tout avait été collecté, les collaborateurs se réunirent dans le bureau du conseil pour commencer le dépouillement. Mais avant toute chose, il fallait désigner un Prrrésident du Bureau, amené à coordonner le comptage, le triage, le re-comptage, le re-triage,… bref vous m’avez compris… des bulletins !

Le barman et le moniteur d’auto-école étaient déjà monté sur l’estrade pour candidater ? Mais seront-ils les seuls candidats ?

Spoiler:

Monaciello prend la parole :

(Raclement de gorge)

(Hum, hum)

(One, Two, One Two,)

(Monaciello se mouche)

(Two)

(Two)

(Test)

(Test)

(Raclement de gorge)

(Monaciello s’étrangle)


- Un ‘ment donné va falloir donner ton discours, Tanguy !


Maximur s’impatiente, c’est qu’il est déjà 18h30 et le dépouillement n’a toujours pas commencé.

- Qui veut des bières ?

Jacques Vabreiht arrive avec un casier de kro à la main.

- Moi !
- Moi !
- Laissez Monaciello parler !
- Moi !
- Moi, con’ !
- Bière qui coule ne fait-elle pas de mousse ? Telle est la question.
- Zzzzz
- Attention vous allez tout salir !


Breiht empoigne la première urne et commence le dépouillement. Monaciello va s’assoir piteusement sur sa chaise. Zarackai dort. Les autres se mettent au travail.

Spoiler:

20h30. La salle résonne à présent d’un sacré brouhaha, qui a d’ailleurs fini par réveiller Zarackai. Chacun a commencé à compter les voix des différents candidats.

- Cinquante voix pour Hao Boniment !
- Trente-trois pour J’lencule Machonne !
- Seulement deux pour Nils-Florian Foc.
- Boudu, c’est normal il est corrompu, ct’enculé.

Intelline se lève soudain :

- Dingue, je compte dix mille trois cent votes pour Emile Panner dans cette boîte !
- Mais c’est pas possible, chaque urne n’est censée contenir que mille voix au maximum !

Breiht avale une gorgée de bière, se lève, et va vider le fond du tonneau dans les sanitaires. Au grand effroi de Petit Ruisseau, qui vient guetter scrupuleusement qu’il n’en verse pas une goutte à côté. Après l’avoir obligé à mettre du Sent Bon, elle autorise Breiht à retourner à sa place. D’un signe de tête, il fait signe à Agielus et Perfect Crime de transporter une nouvelle barique vers la tireuse, pendant qu’il retourne se rasseoir. Parcourant l’assistance d’un air grave :

- Y’a pas que Maximus qui est bourré. Cette urne l’est au moins autant que lui. Quelqu’un ici est en train de truquer les élections !
- C’est un scandale, qui a pu faire ça ?
- Un partisan de Emile, à coup sûr ! Ça n’est pas la première fois qu’ils essaient de trafiquer les comptes.
- Il n’y a personne d’autre que nous dix dans cette pièce, c’est forcément l’un d’entre nous !

Suite à cette dernière parole de Xarfrax, chacun regarde son voisin d’un air soupçonneux. Zarackai, se tournant vers Monaciello, dit :

- C’est quoi cette tache sur ton cou ? On dirait que quelqu’un t’as tamponné.

Un mystérieux hiéroglyphe apparaissait sur le cou de Monaciello :



- Ce n’est pas moi qui ai dessiné ça !
- Y’a l’air d’avoir un petit tatoueur plaisantin dans cette pièce…

Breiht coupe:
- Trouvons avant tout le responsable du bourrage de l’urne, c’est l’élection qui est en jeu. Le petit fan de tags, on s’en occupera plus tard.

Spoiler:

Des accusations fusaient dans tous les sens.


- C’est le vigile ! L’a une sacré tête de supporter d’Emile !
- Non c’est Mona, il m’a fait repasser 5 fois mon permis !
- Moi je dis que c’est Petit Ruisseau, le nettoyage promis par Emile a dû lui plaire !
- Zzzzz Zzzzzzzz…. Gné ?

You could hear the hoof beats pound as they raced across the ground,
And the clatter of the wheels as they spun 'round and 'round.
And he galloped into market street, his badge upon his chest,
His name was Ernie, and he drove the fastest milk cart in the west.

- Je vote pour dégager Xarfrax de cette pièce, son attitude de petit caporal, c’est louche !
- En tout cas, c’est sûr que c’est pas The Hope, con', un prof de philo ne voterait jamais pour Emile.
- Ah oui, et Heidegger alors ? Tu dormais aussi en cours d’histoire ?

Now Ernie loved a widow, a lady known as Sue,
She lived all alone in Liddley Lane at number 22.
They said she was too good for him, she was haughty, proud and chic,
But Ernie got his cocoa there three times every week.

They called him Ernie, (Ernieeeeeeeeeee)
And he drove the fastest milk cart in the west.

- Cher Mona, c’est vous qui chantez si bien ?
- Mais je ne chante pas !

She said she'd like to bathe in milk, he said, "All right, sweetheart,"
And when he'd finished work one night he loaded up his cart.
He said, "D'you want it pasturize? 'Cause pasturize is best,"
She says, "Ernie, I'll be happy if it comes up to my chest."

That tickled old Ernie, (Ernieeeeeeeeeee)
And he drove the fastest milk cart in the west.

- Mais qu'est-ce que c'est que ce bordel !  C’est qui qui a branché la sono ? Et où sont passées les chaises ?

Perfect Crime avait allumé les enceintes de basses, qui envoyaient à présent du gros son. Une jolie mélodie entraînante, bien qu’un peu rétro, leur parvenait aux oreilles. Les chaises avaient été disposées dans le fond de la pièce, sur l’estrade. Elles formaient un cercle, l’assise orientée vers l’extérieur.

- J’ai pensé à organiser un petit jeu, puisque nous n’arrivions pas à nous départager ! J’ai enlevé une chaise de la pièce, car nous allons faire une chaise musicale ! Le dernier à s’asseoir sera dispensé de dépouillement, de toute façon il faut bien choisir. Nous verrons si les bourrages d’urne continuent.

Alors tous les assesseurs se mirent en cercle, autour des chaises, et Perfect Crime relança la chanson.

Now Ernie had a rival, an evil-looking man,
Called Two-Ton Ted from Teddington and he drove the baker's van.
He tempted her with his treacle tarts and his tasty wholemeal bread,
And when she seen the size of his hot meat pies it very near turned her head.

She nearly swooned at his macaroon and he said, "If you treat me right,
You'll have hot rolls every morning and crumpets every night."
He knew once she sampled his layer cake he'd have his wicked way,
And all Ernie had to offer was a pint of milk a day.

Poor Ernie, (Ernieeeeeeeeeee)
And he drove the fastest milk cart in the west.


One lunch time Ted saw Ernie's horse and cart outside her door,
It drove him mad to find it was still there at half past four.
And as he lept down from his van hot blood through his veins did course,
And he went across to Ernie's cart and didn't half kick his 'orse.

Whose name was Trigger, (Triggerrrrrrrr)


Au moment où Perfect Crime coupa la sono, ce fut la bousculade. Zarackai mordit Breiht qui bouscula Intelline qui fit un coup de corde à linge à Maximus qui écrasa la main de Perfect Crime qui fit chanceler TheHope qui agrippa Petit Ruisseau qui flanqua un coup de balai à Agielus qui tira les cheveux de Mona qui fit tomber Xarfrax.

A peine Xarfrax eu-t-il le temps de se relever, les neuf chaises étaient occupées.

Vexé, il tourna les talons sans un mot, non sans avoir balancé deux petites bouteilles, qui s’en allèrent s’exploser sur le carrelage.

- Ah non, mes carreaux !!

Spoiler:

Animation musicale pour vos soirées arrosées:

Now Ernie rushed out into the street, his gold top in his hand,
He said, "If you wanna marry Susie you'll fight for her like a man."
"Oh why don't we play cards for her?" he sneeringly replied,
"And just to make it interesting we'll have a shilling on the side."

Now Ernie dragged him from his van and beneath the blazing sun,
They stood there face to face, and Ted went for his bun.
But Ernie was too quick, things didn't go the way Ted planned,
And a strawberry-flavoured yogurt sent it spinning from his hand.

Now Susie ran between them and tried to keep them apart,
And Ernie, he pushed her aside and a rock cake caught him underneath his heart.
And he looked up in pained surprise and the concrete hardened crust,
Of a stale pork pie caught him in the eye and Ernie bit the dust.

Poor Ernie, (Ernieeeeeeeeeee)
And he drove the fastest milk cart in the west.

Ernie was only 52, he didn't wanna die,
And now he's gone to make deliveries in that milk round in the sky.
Where the customers are angels and ferocious dogs are banned,
And the milkman's life is full of fun in that fairy, dairy land.

But a woman's needs are many fold and soon she married Ted,
But strange things happened on their wedding night as they lay in their bed.
Was that the trees a-rustling? Or the hinges of the gate?
Or Ernie's ghostly gold tops a-rattling in their crate?

They won't forget Ernie, (Ernieeeeeeeeee)
 And he drove the fastest milk cart in the west.

Après le départ de Xarfrax, tout le monde se remet au travail. Non sans appréhension. Après l’effervescence du début du dépouillement et la folie des chaises musicales, un silence studieux est retombé dans la pièce. Chacun est penché sur son urne, sa feuille, et coche les voix récoltées par les différents candidats.

Au bout d’une demi-heure, Zarackai s’écrie :

- Mais c’est pas vrai ! Encore une urne trop remplie ! Il y a 15.000 voix pour Emile Panner dans celle-ci, c’est grotesque !

Tout le monde lève son nez de son urne, pour regarder dans la direction de Zarackai.

- Qui a bien pu faire ça ?
- N’importe qui, il suffit d’y avoir glissé des bulletins supplémentaires.
- Mais où sont-ils cachés, ces bulletins supplémentaires ?

Breiht se décapsule une Chimay, avale une grosse lampée, rote, et dit :

- Une fouille corporelle s’impose. Les hommes : à poils. Les femmes : en sous-vêtements.

Alors que Petit Ruisseau et Intelline s’isolent dans une pièce pour se contrôler mutuellement, chacun des autres se dessape dans un coin de la pièce. Peu après, Breiht vient les contrôler un à un, mais il n'y malheureusement aucun billet irrégulier à constater.

Seul incident comique à signaler, un nouveau petit tatouage est apparu sur la fesse droite de Agielus.

Spoiler:

22h30. La confusion règne à présent. Alors que tout le monde s’est rhabillé, Breiht continue de mener les recherches dans les différents recoins de la Salle du Conseil. Il soulève tables, chaises, tapis, bancs, ouvre les armoires d’où tombent de vieux classeurs poussiéreux contenant les archives des élections précédentes.
Il est suivi de près par Petit Ruisseau, qui, armée d’une chamoisine, remet consciencieusement chaque meuble à sa place après le passage de Breiht. Elle lui jette de temps à autre des regards noirs, devant les amas de poussières qui jonchent le sol après sa fouille des armoires. Amas de poussière qu’elle s’empresse de récolter et de jeter dans la poubelle la plus proche.

Monaciello a recommencé à compter pour la dixième fois le contenu d’une urne, et examine à la loupe chaque bulletin dépouillé dans l’espoir dans distinguer les faux. Le devoir avant tout !

Intelline a sorti son miroir ainsi qu’une bonne dizaine d’accessoires, et tente de refaire son chignon sophistiqué qui s’est défait lors de la fouille corporelle ordonnée par Breiht.

Maximus, Perfect-Crime, Zarackai et Agielus ont entamé une belote, Maximus ayant décrété qu’après 3h de dur labeur, ils avaient bien le droit de faire une pause.

TheHope était lui plutôt content de la tournure des événements, ça changeait des interminables sessions de dépouillement précédentes, pendant lesquelles il ne se passait jamais rien, et ou invariablement c’était un candidat des B-Inculperai, ou du Soir Capitaliste qui était élu. En plus il pourrait rendre Mme Jeanine jalouse lundi, et comme disait le dicton :

-La vendange est un plat qui s’arrose froid !

Néanmoins, ces bulletins pour Emile Panner le préoccupaient beaucoup, et l’ambiance plutôt joyeuse qui régnait dans la pièce le mettait mal à l’aise. Il était en effet probable qu’au moins deux fanatiques se trouvaient parmi eux, et il fallait les trouver parmi ces visages sympathiques. Ca lui rappelait d'ailleurs un autre dicton :

-Méfies toi du loup qui dort ! Serait-ce Zarackai ?


Zarackai justement, était occupé à se refaire une cinquième tasse de café derrière le bar, histoire de ne plus s'endormir pendant cette passionnante partie de cartes. Il s’adressa alors à Perfect Crime, qui était son partenaire.

- Dis donc, tu nous remettrais pas un peu de musique ?
- Bien sûr !

Perfect Crime sort alors un CD de sa poche, le met dans le lecteur, et une musique douce démarre.

LIEN

- Boudu, c’est beau ! Qu’est-ce que c’est que ça, con?
- Les Maîtres Chanteurs de Nuremberg, un opéra de Wagner très populaire dans ma famille.

En entendant ça, le sang de Monaciello ne fait qu’un tour :


- C’est un partisan de Emile ! Perfect Crime est un partisan de Emile ! Cet opéra était l’hymne officiel de l’Anticolonialisme SA, dont s’inspire tout le programme de son parti, l’Inno Folatrant ! Arrêtez-le !


Avant que quiconque ai eu le temps de réagir, Perfect Crime se précipite vers sa veste, et en sors une télécommande équipée d’un gros bouton, sur lequel il s’empresse d’appuyer.

-Ma mission ici est terminée, bon amusement pour la suite du dépouillement !

Et il s’enfuit par la porte.

Un bourdonnement à peine audible se fait alors entendre, bourdonnement qui s’amplifie petit à petit, jusqu’à ce que soudain, des dizaines de drones viennent éclater les vitres de la salle du conseil. Ils transportent chacun ce qui ressemble très fort à une urne de dépouillement, dont ils s’empressent de déverser le contenu dans la salle du conseil. Des dizaines de milliers de bulletins pour Emile Panner tombent alors au milieu des assesseurs ébahis…

Spoiler:

00h30. Ca faisait maintenant deux heures que Perfect Crime s’était enfuit. Les assesseurs restants avaient eu du pain sur la planche pour réparer tous les dégâts fait par les drones et le désordre causé par les amas de bulletins épars dans la Salle du Conseil. Mais après des interminables balayages et va-et-vient jusqu’à la benne à ordure pour y déposer tous les faux bulletins, la salle de conseil avait peu à peu repris un fonctionnement normal.

Après tout, ils avaient encore jusqu’au matin pour terminer le dépouillement, ce qui devrait être possible en mettant les bouchées doubles.

Chacun était maintenant le nez sur ses comptes, et un silence studieux régnait dans la salle. Breiht avait rechargé une nouvelle fois la tireuse à bière, histoire de tenir jusqu’au bout de la nuit. Les barriques commençaient d’ailleurs à s’accumuler dans un coin de la pièce, c’est qu’il y avait quelques sacrées panses à bières parmi l’assistance !

Chacun était plongé dans ses pensées :

« Combien de temps ça va me prendre encore tout ça ! Carpe Diem, carpe diem, quel dicton de merde ! Là j’ai qu’une envie c’est rentrer chez moi, mettre un bon DVD, et m’endormir devant la TV ».

« Quel désordre ! J’en ai pour la semaine pour tout nettoyer. Et ces fenêtres, dire que j’avais passé trois heures à les rendre impeccables pour les élections ! Quel gâchis. Le premier qui renverse encore une bouteille de bière, je l’assomme ! »

« Tout ça n’est plus de mon âge, il faudra que je me fasse dispenser la prochaine fois. Le vieux Machonne il ira recruter lui-même, j’en ai marre de devoir me trimballer son tampon à la con. »

« Boniment, Machonne, Panner, Foc, Panner, Boniment, Boniment, Foc, Foc, ah non Machonne… A combien j’étais déjà ? »

« Bon, ce jeune fougueux s’est fait prendre. Quelle idée aussi de se trimballer l’hymne de l’Anticolonialisme SA sur soi ! Il faudra en référer à Emile, on ne peut pas se permettre d’avoir dans nos rangs des militants qui dévient de la ligne conductrice. Nous devons paraître modérés, patriotes, mais pas racistes.
En attendant, je vais devoir retarder le dépouillement, ce bureau est clé dans la propagande du chef, on doit le gagner. Faut se débarrasser de ses gêneurs. Par tous les moyens…

Voyons, par qui commencer ?  Lui ? ou lui ? non, non, trop risqué… on va plutôt commencer par elle !»


1h00 Petit Ruisseau lève le nez de son tas de bulletin, alors que chacun continue de travailler dans le silence. Un bruit a attiré son attention.

(Ploc, ploc)

Encore quelqu’un qui a mal fermé le robinet des toilettes !
Elle se dirige donc vers les sanitaires, tout en prêtant l’oreille.

(Ploc, ploc)

C’est le robinet du fond, chez les hommes. Tous des fainéants !

(Ploc, ploc)

D’un geste, elle ressert le robinet. L’eau ne coule plus.

(Ploc)

Le bruit provient cette fois des sanitaires d’à côté, dont la porte est poussée. Une mare d’eau croupie dépasse légèrement de sous la porte.

- Qui a un problème de digestion? Tout se passe bien ? Pensez à nettoyer quand vous quitterez, hein ? Je ne suis pas votre boniche !

Pas de réponse.

-Tout se passe bien ?

Pas de réponse.

D’un geste, elle ouvre la porte.



1h30. Monaciello en a fini avec son stock de bulletins. Sans avoir l’air d’y toucher, il toussote de satisfaction. Suffisamment bruyamment pour que Zarackai et Maximus puissent admirer son efficacité. Eh oui, ils avaient voulu se passer de son expertise, mais il avait mis un point d’honneur à prouver son efficacité. C’est pas le poivrot qu’ils avaient choisi qui serait capable de faire pareil, hein ?
Se redressant, il parcourt la salle d’un regard circulaire. Agielus est affairé à recompter une pile de bulletins, mais ses doigts poissés par une part de pizza adhèrent aux feuillets ce qui rend la tâche particulièrement malaisée. Zarackai n’a que faiblement avancé, il a encore dû s’endormir. Breiht est plutôt efficace, mais il semble avoir refilé une partie de son tas à Intelline, car sa vitesse de comptage n’est pas cohérente avec la hauteur de la pile restante. Quant à Maximus, s’il roule les mécaniques en essayant d’impressionner l’esthéticienne, Monaciello a bien repéré les regards en coin qu’elle lui a adressé toute la soirée.
Les sièges de Petit Ruisseau et TheHope sont vides, avec des piles de bulletins non traitées.

En soupirant, il se dirige vers les sanitaires, la bière commence à peser !

Il ouvre la porte et allume la lumière.

- Oh !

Le cadavre de TheHope se balance au bout d’une corde, pendue à la tuyauterie. Une rose gît à ses pieds.

- Oh !

Les pieds de Petit Ruisseau dépassent de sous la porte d’un sanitaire, vers le fond. Elle repose en partie sur un sanitaire, la tête noyée dans une cuvette bouchée.

Spoiler:

Le moniteur d’autoécole n’en croit pas ses lunettes, et manque de chanceler devant le carnage devant ses yeux. Les admirateurs de ce Panner vont vraiment trop loin. Ils sont prêts à tuer pour que leur chef soit élu ! Mais doit-il pour autant prévenir les autres? Il y a au minimum encore un type prêt à tout pour parvenir à ses fins parmi eux !

Sur qui s’appuyer ?

Le barman ? Après tout, même si ça fait mal à Monaciello de le reconnaitre, il a plutôt bien mené le déroulement des élections, malgré les multiples événements et irrégularités qui ont retardé le dépouillement. Mais il y a quelque chose de je ne sais quoi de dur et catégorique chez Breiht qui ne rassure pas Monaciello.

L’esthéticienne ? Elle a plutôt bien fait son travail jusqu’à présent, et est restée assez discrète. Mona la voit mal capable de noyer la femme de ménage et de se débarrasser du philosophe de manière aussi discrète. Par contre, sa discrétion serait un avantage pour glisser de faux bulletins dans une urne, voir pourquoi pas aller tamponner l’intimité des autres assesseurs.

Le vétérinaire ? Il a dormi les trois quart du temps, mais ça n’en fait pas pour autant un innocent. Bizarrement, il n’a pas été assassiné, ni tamponné, alors qu’il aurait été une cible facile pour n’importe quel assassin peu scrupuleux. Et rien ne dit qu’il ne planque pas un scalpel dans un coin.

Le videur ? Cette brute épaisse semble en effet trop bête pour monter une machination à base de faux billets dans une urne trop pleine. Par contre, zigouiller deux assesseurs sans bruit en deux/trois mouvements semble tout-à-fait dans ses cordes.

Reste le pizzaiolo. Oui, le pizzaiolo. Il ne semble pas plus honnête que les autres mais cependant, on voit mal un admirateur de Panner se laisser tatouer sur la fesse gauche une image de l’ennemi juré, Machonne, sans pousser les hauts cris ni faire un esclandre. En voilà probablement un en qui Monaciello peut avoir totalement confiance.

Plongé dans ses pensées, Monaciello retourne alors dans la salle et se retrouve devant une scène inattendue : Intelline est en train d’insulter Breiht :

- C’est lui le partisan de Panner : je viens de tomber sur 100 bulletins, ils sont tous pour le même candidat ! Et bizarrement, son tas de bulletins est vide ! Je suis certaine que c’est lui qui me les a refilés !
- Je vous rappelle que je suis le président du bureau de votes, je suis l’intégrité même ! Il est normal que ma pile soit plus petite, je dois aussi contrôler vos erreurs, ma chère. Au lieu de vous limer les ongles, vous feriez bien d’avancer sur le comptage des bulletins, vous nous mettez en retard.

Maximus s’interpose alors, retroussant ses manches :

- Dis donc, tu ne parles pas aux dames comme ça, tout président que tu es ! Je te vais te flanquer une dérouillée mon coco, dont tu te rappelerAargh !

Le videur s’arrête net, étonné, alors qu’une petite lame métallique ensanglantée est apparue à la place de sa langue. Tandis que le sang se déverse à flots en-dehors de sa gorge, il bascule en avant, face contre terre.

Zarackai, s’approche alors, et récupère son scalpel sur le cadavre de Maximus.

- Regardez l’intérieur de sa manche, le logo, je crois qu’on a trouvé le responsable du bourrage des urnes.



Breiht se rassied :

- Bon, il semble qu’on a trouvé notre homme. Allez, tous au travail.

Spoiler:

2h30 Le dépouillement a bien avancé, malgré la réduction des équipes à 50%.

- C'est Nils Florian Foc qui serait content, on est en plein dans son programme ! Comme quoi, pas besoin de remplacer tous ces fonctionnaires faignants, on arrive à travailler aussi efficacement!

- Oui mais ça fait deux heures qu'on a pas bu de bière!

- Ni mangé de pizza!

- Ni fais de pause toilette entre copines!

- En même temps t'as pas de copine pour te garder la porte.

- Vous trouvez toujours des faux bulletins ? Moi ça fait 1h que tout semble normal.

- Allez, on continue, plus que 5 urnes à dépouiller.

Alors que Breiht ouvre l'une d'entre elles, une avalanche de billets pour Emile Panner s'en déverse...

Spoiler:

3h00 Chacun des assesseurs restants s'attaque maintenant à une urne. Une fois que ce sera terminé, le dépouillement sera complet. Breiht prend la parole:

- Avec 20 urnes sur 25 dépouillées, nous avons la répartition des votes suivante: 30.2% des voix pour Cameron Malmenu, 29.8% pour J'Lencule Machone, 29.2% pour Emile Panner, 8,9% pour Hao Boniment et 1.9% pour Nils Florian Foc. C'est serré ! Je vous demande la plus grande vigilance pour le comptage des derniers bulletins, une erreur pourrait tout changer!

Absolument pas concentré sur son dépouillement, Agielus a le regard dans le vague, les yeux fixés sur le cadavre du videur stocké dans un coin, mais perdu dans ses pensées. Il se rêve sur un podium, sur la plus haute marche, en tant que Champion du Monde de Pizzas acrobatique. Le concours aura lieu dans une semaine, et il a révisé depuis des mois les figures prévues. Cela commencera par la figure du "Manchot": deux trois jongles à une main avec trois pâtes à pizzas. Plutôt facile pour commencer, ça permettra de s'échauffer. Tout l'art étant que chacune des pizzas ne s'arrête jamais de tourner, deux points de pénalité sont prévus dans un tel cas.

Ensuite, il réalisera la figure dite de "l'Otarie": pendant qu'il fera tourner une pizza avec sa main droite, l'autre dans sa main gauche, il fera rebondir la troisième sur son nez à la manière d'un petit ballon.

Le clou du spectacle étant la figure dite de "l'Eléphant", sa botte secrète: d'un geste vif, il propulsera chacune des pâtes en tournoyant, le plus haut possible. Suffisamment haut pour avoir le temps de retirer le tablier, faisant apparaître sous l'assistance ébahie sa tenue d'Adam. D'un geste théâtral, il croisera alors les bras dans le dos, en pensant très fort à son actrice préférée, pour se préparer à recevoir et repropulser les pizzas...

(BOUM!)

Agielus vient de renverser son bureau, faisant sursauter tout le monde.

- Il est malade ce gars, on dirait que le cadavre du videur l'excite ! Balancez-lui un seau d'eau froide!

Intelline, confuse devant une telle scène, en fait tomber son sac à main de stupéfaction. Les palettes de maquillage se répandent partout, ainsi que les rouges à lèvre, far à paupières, mascarat, gloss et tout le toutim. Deux trois tampons à encre se répandent également sur le sol. Monaciello s'en saisit, et reconnaît immédiatement l'origine de son petit tatouage dans le cou.

- C'est elle la partisante de Machone! Sortez-là d'ici !

Breiht et Zarackai l'accompagnent gentiment dehors, et referment la porte derrière elle.

Spoiler:

Agielus, Monaciello et Zarackai votent contre Breiht.
Breiht vote contre Monaciello.


Breiht meurt, il était le dernier loup garou. Il donne la mairie à Monaciello avant de mourir

Les vainqueurs sont les trois villageois survivants : Agielus le chapelier, Zarackai le shaman et Monaciello le malade.